Ce colloque a pour ambition de réaliser un état des savoirs sur la thématique des personnels accompagnants les élèves en situation de handicap à l’école. Mise en place il y a une vingtaine d'années sous la forme des auxillaires de vie scolaire (AVS), elles sont devenues élèves en situation de handicap (AESH) aujourd’hui et ont connu une croissance de leur effectif spectaculaire, elles étaient 132 000 à la rentrée 2023. À la veille des vingt ans de la loi de 2005 nous souhaiterions mettre en lumière ce que la recherche en sciences humaines et sociales a produit à propos de ces travailleuses.
2023, l’accompagnement des élèves en situation de handicap marque la 20ème année de son officialisation étatique. La loi n° 2003-400 du 30 avril 2003 relative aux assistant·e·s d’éducation prévoit que « des assistants d'éducation peuvent être recrutés […] pour exercer des fonctions d'assistance à l'équipe éducative […], notamment pour […] l'aide à l'accueil et à l'intégration scolaires des élèves handicapés, y compris en dehors du temps scolaire ». À la veille de la rentrée de 2002, ce sont environ 3 000 employé·e·s, alors appelé·e·s auxiliaires d’intégration scolaire (AIS) ou auxiliaires de scolarisation, qui exerçaient comme mission principale un accompagnement dans les écoles auprès d’élèves en situation de handicap. L’essentiel de la cohorte semble être embauché sous contrats aidés, en particulier sous contrat emplois-jeunes et à la suite d’initiatives localisées. En 2003, l’Éducation nationale reprend le monopole de cet accompagnement scolaire : naissent les Auxiliaires de vie scolaire, AVS, sous contrats d’assistant·e·s d’éducation. À partir de 2005, l’accompagnement des élèves handicapé·e·s a pu être assuré également par les EVS – Employé·e·s de vie scolaire et/ou ASEH – aides à l’accueil et à la scolarisation des élèves handicapés (2005), les Ascol – assistant·e·s de scolarisation (2011) et à partir de 2014, les AESH – accompagnant·e·s d'élèves en situation de handicap, ce qui marque une grande variabilité des conditions d’emploi et de travail définies par les politiques publiques. À la rentrée 2023, elles·ils sont plus de 132 000 salarié·e·s, à plus de 93 % des femmes. Parallèlement, le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en école ordinaire est passé de 130 000 en 2004 à plus de 430 000 à la rentrée 2023. À la veille des 20 ans de la loi de 2005, ce colloque se veut faire le bilan des recherches menées sur ce personnel d’accompagnement des élèves en situation de handicap.
Trois axes sont proposés pour donner des pistes de réflexion, mais la possibilité de faire des propositions hors axes est ouverte, à condition qu’elles s’intéressent de manière centrale aux AVS-AESH.
Les accompagnant·e·s des élèves en situation de handicap sont des travailleur·euse·s de l’École qui aident des enfants présentant un handicap dans le cadre scolaire, que ce soit dans les apprentissages, dans la participation aux activités et/ou dans l’accomplissement de certains gestes. Mais qui sont- elles·ils ?
Dans cet axe, il s’agira d’interroger à la fois les caractéristiques de ce personnel mais également leurs parcours antérieurs. Il sera intéressant de penser les trajectoires scolaires, formatives, personnelles, familiales, géographiques, résidentielles, médicales, professionnelles et caetera, en tentant de les caractériser de la façon la plus fine possible.
À partir de ces éléments, qu’est-ce qui explique qu’on devienne AVS-AESH ? Évidemment, il faudra aussi prendre en compte l’évolution des politiques publiques autour de cet emploi car elles ont remodelé les profils des accompagnant·e·s au fil du temps. Plus encore, comment expliquer que le métier d’AVS-AESH demeure peu reconnu et rémunéré en dessous du seuil de pauvreté ? Les propositions portant sur des comparaisons avec d’autres emplois de secteurs similaires, subordonnés et/ou genrés peuvent être pertinentes.
Finalement, quelle place occupent ces conditions d’emploi précaires dans les trajectoires des AVS-AESH ? Sur plus de 20 ans, quelle « carrière » d’AVS-AESH peut-on observer ? Autrement dit, il est intéressant ici de questionner des évènements marquants, soit des ruptures, mais également des continuités dans les parcours de vie des AVS-AESH : chômage, problèmes de santé, succession d’emplois, enchevêtrements de formations, événements familiaux, liens avec le handicap… sont autant de pistes possibles d’analyse que les communications pourront développer. Ces parcours pourront également être lus à l’aune des formations et des compétences professionnelles.
Les évolutions du système éducatif français depuis un demi-siècle ont conduit à l’accueil d’élèves toujours plus hétérogènes. Pour les accueillir et les scolariser, les gouvernements ont fait émerger ou renforcer les missions de nouveaux groupes professionnels comme les CPE (conseiller·e·s principaux·les d’éducation) ou les ATSEM (agent·e·s territoriaux·les spécialisé·e·s des écoles maternelles), et évidemment les AVS-AESH. Cette multiplication des personnels dans l’école conduit à une complexification des territoires professionnels, les enseignant·e·s devant composer avec des personnels aux formations, aux pratiques et à l’origine sociale différentes de la leur. Comment peuvent alors se rencontrer des sensibilités, des conceptions de l’école, des rapports au savoir, etc. multiples et souvent hétérogènes ? C’est ce questionnement que les communications de l’axe 2 chercheront à explorer.
Les contributions pourront d’abord questionner les enjeux de territoires professionnels. De quels types de missions héritent les AVS-AESH ? Comment les négocient-elles et comment et par qui sont-elles régulées ? Des propositions pourront s’intéresser aux relations entretenues avec les enseignant·e·s. Quelles formes peuvent prendre les “collaborations” ou “partenariats” éducatifs avec un personnel mieux payé et davantage reconnu comme central dans l’institution ? Il est attendu des contributions qui viennent documenter la construction des pratiques professionnelles et l’observation de ces pratiques en acte. Comment se forgent-elles ? S’inscrivent-elles dans d’autres expériences (familiales,3militantes, etc.) ? Entrent-elles en conflit avec les pratiques des enseignant·e·s ? Un territoire spécifique aux AVS-AESH se dessine-t-il ?
De plus, les communications pourront également explorer les relations entretenues avec d’autres personnels de l’école comme les ATSEM, les assistant·e·s d’éducation ou les animateur·rice·s. Des hiérarchies, des coopérations ou des conflits de territoires existent-ils entre ces travailleurs et travailleuses subordonné·e·s de l’école ? Et de manière plus large, quelles collaborations peut-on observer avec le secteur social et médico-social ?
Enfin, des communications pourront interroger la place des AVS-AESH dans les organisations. Arrivent-elles·ils à se forger des marges d’autonomie ? Comment négocient-elles·ils leur place dans l’école vis-à-vis de leur hiérarchie ? Quelle influence ont eu les différentes réformes sur cette organisation du travail ? Comment s’organise la gestion de ce personnel AVS-AESH au niveau des établissements, des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL), des directions des services départementaux de l’Éducation nationale (DSDEN), des rectorats et du ministère de l’Éducation nationale, tant sur les plans pédagogiques qu’administratifs ? Avec quelle(s) incidence(s) ?
Les AVS-AESH arrivent dans l’École comme une adaptation présentée comme nécessaire à l’accueil des élèves en situation de handicap. Il convient donc d’interroger tant la création d’un personnel spécifique affecté à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, que son rôle dans le projet d’École inclusive porté par les lois de 2013 (loi n°2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République) puis de 2019 (loi n°2019-791 du 26 juillet 2019 pour une École de la confiance). De plus, quelle place les AVS-AESH tiennent dans la scolarisation des enfants en situation de handicap ? Quelles tâches liées à cette scolarisation assument-elles·ils (soutien aux activités pédagogiques, aide à la vie quotidienne, activités périscolaires…) ? Plus largement, quelles sont les spécificités et les généricités des pratiques éducatives, pédagogiques et didactiques des AVS-AESH ? Quelles appréhensions du handicap ont-elles·ils ? Dans quelles situations les AVS-AESH se trouvent-elles·ils en difficulté ? L’enjeu de la formation au(x) handicap(s) et aux besoins éducatifs particuliers est également à éclairer : quelles sont les formations proposées aux AVS-AESH ? Quelles compétences sont recherchées pour l’accompagnement ? Comment les AVS-AESH se forment-elles·ils ? Plus globalement, dans quelle mesure les AVS-AESH participent-elles·ils à la dynamique inclusive affichée par l’Éducation nationale ?
De plus, dans le travail auprès d’élèves en situation de handicap, on peut s’interroger sur la participation de ces dernier·e·s à l’accompagnement : quelles coopérations observe-t-on ? Comment les élèves perçoivent-ils·elles et se saisissent-ils·elles de cet accompagnement scolaire ? Dans quelles situations les élèves s’opposent-ils·elles à l’accompagnement ou le réclament-ils·elles ? Mais aussi, qui sont ces élèves accompagné·e·s ? Des éclairages sur les processus de reconnaissance du handicap et de la notification des besoins d’accompagnement humain seront les bienvenus. De plus, les communications analysant la place des parents dans la demande d’un accompagnement scolaire et sa mise en acte seront appréciées.
Enfin, l’École inclusive et l’accompagnement des élèves en situation de handicap en école ordinaire ont donné lieu à de nombreuses mobilisations professionnelles ou émanant des associations du champ du handicap. Quelles positions politiques, associatives, professionnelles et syndicales s’expriment et avec quelles évolutions ?
Nous attendons des propositions de communication issues de recherches en sciences humaines et sociales.
Les propositions de communication devront répondre aux normes suivantes :
Langue : français
Nous encourageons les propositions de jeunes chercheurs et jeunes chercheuses (masterant·e·s, doctorant·e·s, jeunes docteur·e·s).
à suzy.bossard@univ-brest.fr, arthur.imbert@univ-nantes.fr, adelaine.simonnet@univ-poitiers.fr.
Une réponse sera apportée à chacun·e courant mai.
BEDOIN D., JANNER-RAIMONDI M., 2016, « Rôles de l’auxiliaire de vie scolaire auprès de jeunes enfants en situation de handicap », Spirale - Revue de recherches en éducation, 57, 1, p. 67‑80.
BELMONT B., PLAISANCE É., VÉRILLON A., 2006, « Accompagnement et intégration scolaire », Contraste, 24, 1, p. 247‑266.
BELMONT B., PLAISANCE É., VÉRILLON A., 2009, « Les auxiliaires à l’intégration scolaire des enfants en situation de handicap. Conditions de travail et développement de compétences professionnelles », ALTER, 3, 4, p. 320‑339.
BELMONT B., PLAISANCE É., VÉRILLON A., 2011, « Conditions d’emploi des auxiliaires de vie scolaire et qualité de l’accompagnement des élèves handicapés », Revue française de pédagogie, 174, 1, p. 91‑106.
BORDEAU M., BOURGET G., 2009, « Le personnel accompagnant scolaire, une approche socio-historique », La nouvelle revue de l’adaptation et de la scolarisation, 45, 1, p. 55-69.
BOSSARD S., 2015, Précariat et rapports sociaux dans les métiers de service aux personnes. Les Auxiliaires de Vie Scolaire (AVS) dans l’Éducation nationale, Thèse de doctorat de sociologie, Villeneuve-d’Ascq, Université Lille 1, 502 p.
BOSSARD S., 2013, « Grammaire de la contestation et rapports sociaux : le cas d’un « métier » de service », Raison présente, 186, 1, p. 39‑48.
BOSSARD S., 2022, « Luttes de femmes précaires : des luttes féministes ? Les mobilisations des Auxiliaires de vie scolaire et des travailleuses des services aux personnes », dans ROJTMAN S. (dir.), Féministes ! luttes de femmes, lutte de classes, Paris, Éditions Syllepse.
BOSSARD S., 2023, « Chapitre 5 – Quand l’emploi domine le travail : le précariat des travailleuses des services aux personnes », dans BRUGIÈRE F., GLAYMANN D., TIFFON G. (dirs.), Pouvoirs au travail. Management, statuts et autonomie dans les situations de travail contemporaines, Toulouse, Octarès éditions (Le travail en débats).
CHAUVOT N., 2011, « Habiletés éducatives et gestes professionnels d’ajustement d’un Auxiliaire de vie scolaire accompagnant un élève autiste : étude de cas », Travail et formation en éducation, 8.
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CHEVALIER C., IMBERT A., JACQUOT A., 2022, « L’autonomie dans l’invisibilité. Les accompagnantes des élèves en situation de handicap », La nouvelle revue du travail, 20.
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